Qui sont les Burkinabè ? Dix traits pour comprendre un peuple discret et solide

Burkinabè de naissance et de cœur, je vous propose un décodage maison. Dix choses à connaître pour saisir ce qui fait battre nos cœurs discrets. Ton léger, regard franc, sans folklore inutile.
Introduction
Ah, les Burkinabè. Silencieux, presque furtifs. Pas de buzz tonitruant, pas de scandale à la une. Un nom pourtant résonne comme une promesse: Thomas Sankara, le pays des Hommes intègres, le Burkina Faso.
Installez-vous, servez-vous mentalement une calebasse d’eau, de zom koom, de bissap, ou un petit dolo si vous y tenez. Voici dix vérités, entre fierté parfois maladive, profil bas à l’étranger et engagement têtu, pour comprendre qui nous sommes.
1 Réserve et mystère: la fierté qui n’emploie pas le mégaphone
La discrétion est un réflexe culturel. Même au sommet, nos figures restent sobres. On pense à Lassina Zerbo ou à Francis Kéré, plus occupés à travailler qu’à s’afficher.
Côté musique, beaucoup d’artistes créent d’abord pour des oreilles burkinabè. Ce n’est pas une fermeture, c’est une fidélité à ce qu’ils sont. Si la chanson voyage, tant mieux. Sinon, la fierté dort tranquille.
Idée clé: accomplir parle plus fort qu’annoncer. Si vous le découvrez, tant mieux. Si vous l’ignorez, tant pis.
2 Intégration lente: la confiance se mérite
Changer de quartier, à Ouaga comme à l’étranger, demande du temps. On observe, on repère qui aide et qui complique la vie, on rend service, on prête une marmite, on rend un tournevis. Le lien se construit par petits gestes.
Hors du pays, la prudence s’amplifie. Vous en saurez peu sur nous tant que nous n’avons pas décidé de nous confier. Mais une fois la confiance accordée, c’est porte ouverte. Vous entrez dans la famille.
3 Le pardon XXL: patience parfois au-delà du raisonnable
Nous excusons, nous relativisons, nous réessayons. Dans la vie quotidienne, au travail, en politique, la ligne rouge recule longtemps avant de casser. Les conflits se règlent d’abord en famille, entre voisins, sous l’arbre à palabres. Le tribunal n’arrive qu’en dernier recours et laisse une trace sociale.
Lucidité: cette indulgence frôle parfois la naïveté. Mais elle dit notre foi dans la réconciliation.
4 La communauté d’abord: du foyer au drapeau
Notre échelle affective est limpide. D’abord la famille, puis le village, la commune, la région, et enfin le pays.
À l’étranger, cette logique devient très concrète. Beaucoup de villes abritent un foyer des Burkinabè, un appartement loué en commun pour se retrouver, célébrer et héberger un compatriote en difficulté.
Principe constant: la réussite individuelle n’a de sens que si elle profite au cercle.
5 À l’étranger, mode ambassadeur
Dès la frontière franchie, profil bas. Papiers en règle, file d’attente respectée, fréquentations choisies. Chaque faux pas éclabousserait la famille, le village et le pays.
Rester souvent entre compatriotes n’est pas refuser l’autre. C’est éviter les histoires compliquées et préserver la réputation collective.
6 Nous ne sommes pas parfaits
Au pays, les rivalités familiales, lignagères ou politiques existent. Nos prisons sont surpeuplées. Nous ne sommes ni anges ni robots.
En parallèle, l’hospitalité est proverbiale. On peut céder son lit à l’étranger, à condition qu’il respecte la maison. Le manque de respect, c’est la sortie.
Moralité: nous savons accueillir et pardonner, mais la honte reste l’ennemi numéro un.
7 Double standard assumé: la diplomatie du caméléon
Chez soi, on négocie. Ailleurs, on applique. Ce n’est pas de la duplicité, c’est de l’intelligence contextuelle. On protège le passeport et le blason.
Même logique en ligne. Face à une attaque venue de l’extérieur, la solidarité numérique s’active très vite, parfois avec une pointe de mauvaise foi patriotique. Entre nous on débat, vers l’extérieur on fait bloc.
8 Romance en service minimum: des mots rares, des gestes sûrs
Le mooré, langue majoritaire, est taillé pour la sagesse et la stratégie. Il l’est moins pour la dentelle sentimentale. On déclare peu, on prouve beaucoup. Toiture réparée, promesse tenue, présence assurée.
Le romantisme existe, il se vit plus qu’il ne se prononce.
9 L’honneur, burkindi, comme carburant
Travailler proprement, gagner son pain honnêtement, cela ne se négocie pas.
Un proverbe moaga résume l’esprit: mieux vaut la mort que la honte. On peut tolérer un retard, pas une entorse à la dignité. Et une fois convaincus, nous sommes difficiles à faire changer d’avis. Il faut des arguments solides.
10 Thomas Sankara, ligne rouge et boussole
Président de 1983 à 1987, il a rebaptisé le pays et prôné intégrité, sobriété, justice sociale, émancipation. Sa mort prématurée a figé un repère moral.
Nous savons qu’il n’était pas parfait. C’est justement ce mélange d’exigence et d’humanité qui nous parle. Critiquer Sankara demande des gants. Il incarne la preuve que l’idéal peut gouverner.
Conclusion
Discrets mais fiables, indulgents mais intraitables sur la dignité, lents à s’ouvrir mais fidèles jusqu’au bout. Voilà, en dix traits, le visage des Burkinabè. Nous préférons les actes aux slogans, la main tendue au vacarme, et burkindi comme ligne de conduite.
Si vous croisez un pas feutré, ne vous y trompez pas. La fierté est là, sans trompette, et la communauté, derrière, tient les fondations.
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