Getting your Trinity Audio player ready... |
L’économie circulaire en Afrique : Comment les jeunes transforment les déchets en or vert
Dans une Afrique où les défis environnementaux se mêlent aux réalités économiques et sociales, des jeunes refusent le fatalisme. Leur arme ? L’innovation verte. Leur matière première ? Les déchets. Leur ambition ? Transformer ce que d’autres rejettent en solutions durables. Bienvenue dans l’univers inspirant de ces jeunes Africains qui prouvent que la poubelle peut être le point de départ d’une autre façon de voir le progrès.
La jeunesse africaine, moteur d’une économie circulaire
Des tonnes de plastique, de métal, de textile et de déchets organiques sont générées chaque jour sur notre continent. Longtemps considérés comme des nuisances, ces résidus deviennent aujourd’hui de plus en plus, des ressources entre les mains d’une jeunesse ingénieuse. L’économie circulaire, encore balbutiante dans certains pays, s’impose peu à peu comme une alternative crédible au modèle linéaire de production-consommation-rejet. Et à la tête de cette révolution douce, des visages jeunes, audacieux et profondément engagés.
Ce mouvement n’est pas le fruit du hasard. Il est nourri par une prise de conscience environnementale croissante, par le chômage qui pousse à l’inventivité, mais aussi par un profond attachement à la terre, à la communauté, à la dignité de vivre dans un environnement sain. Loin des discours stériles et banalité affectueuses de nos politiciens, ces jeunes passent à l’action.
Du plastique à la brique : la révolution des matériaux recyclés

Conaissez vous Nzambi Matee? C’est une jeune ingénieure kényane et fondatrice de Gjenge Makers, une start-up qui fabrique des pavés à partir de déchets plastiques. Dans un pays où plus de 500 tonnes de plastique sont rejetées chaque jour, Nzambi a trouvé le moyen de redonner vie à ces déchets en les transformant en briques écologiques, plus résistantes que le béton. Ce n’est pas simplement une prouesse technique, c’est un acte militant. Chaque pavé posé est un pas vers une ville plus propre, plus durable, plus juste.
Et elle n’est pas seule. Au Burkina Faso, Yamba D System recycle les sachets plastiques pour en faire du mobilier urbain. Au Nigeria, WeCyclers collecte les déchets à vélo dans les quartiers populaires de Lagos pour les revaloriser. Ces jeunes entreprises ne se contentent pas de recycler : elles créent de l’emploi, réduisent l’empreinte écologique et changent les mentalités.
De l’artisanat aux objets design : l’upcycling créatif
L’innovation verte prend aussi une dimension esthétique et culturelle. À Dakar, Kër Thiossane, un espace culturel collaboratif, organise des ateliers où de jeunes artistes transforment vieux jeans, canettes ou composants électroniques en objets design, œuvres d’art ou accessoires de mode. C’est le royaume de l’upcycling, cette pratique qui consiste à réutiliser les matériaux usés pour leur donner une nouvelle vie plus noble.
Dans cette perspective, le recyclage devient un langage. Il raconte notre histoire de l’Afrique : une Afrique créative, résiliente, fière de son génie local. Là où d’autres voient des ordures, ces jeunes voient de la matière à création, du sens, parfois même de la poésie.
Le biogaz et le compost : vers une autonomie énergétique locale
Nos zones rurale n’est pas en reste. Dans plusieurs régions, des jeunes inventeurs transforment les déchets organiques (déjections animales, épluchures, résidus agricoles) en biogaz. C’est le cas au Burkina Faso, où de belles initiatives avec l’accompagnement de l’état et d’ONG, construisent des biodigesteurs artisanaux pour fournir du gaz de cuisson aux familles en milieu rurale, mais également dans les villes pour ceux qui ont les espaces pour ce type d’installations. Ce système simple, économique et durable réduit la dépendance au bois, lutte contre la déforestation et améliore la santé des femmes exposées à la fumée des feux de bois.
D’autres projets, comme Green Energy Biofuels au Nigeria, proposent aussi des solutions de biodigestion et de compostage pour valoriser les déchets agricoles. Ici, chaque pelure de manioc devient une source d’énergie. Chaque feuille fanée devient un engrais naturel. La boucle est bouclée.
L’éducation verte : transmettre pour transformer
Mais au-delà des inventions, il y a une autre dimension fondamentale à cette révolution : la transmission. Ces jeunes innovateurs ne travaillent pas dans leur coin. Ils animent des formations, interviennent dans les écoles, créent des tutoriels en ligne. Leur objectif : faire germer des graines d’éveil écologique dans les esprits, en particulier chez les plus jeunes.
À Abidjan, l’association ÉcoJeunes organise des séances de sensibilisation dans les collèges, où les élèves apprennent à trier, composter, recycler, mais aussi à penser autrement leur rapport à la consommation. « Nous ne voulons pas juste recycler des déchets, nous voulons recycler des mentalités », explique Cédric N’Guessan, cofondateur de l’initiative.
Ce travail d’éducation populaire est essentiel pour enrayer le cycle de surconsommation et de gaspillage. Il prépare une génération entière à faire des choix éclairés, à défendre leur droit à un environnement sain, à voir dans la nature un partenaire plutôt qu’une ressource à exploiter.
Des solutions locales à impact global
Ce qui rend ces initiatives si puissantes, c’est qu’elles sont conçues localement. Elles partent des besoins du terrain, utilisent des matériaux disponibles, mobilisent les savoir-faire locaux. Elles ne copient pas, elles inventent. Et cette approche “made in Africa” séduit même au-delà du continent.
Des jeunes innovateurs africains sont invités dans des conférences internationales sur le climat, cités dans des publications scientifiques, récompensés par des prix prestigieux. Leur impact dépasse les frontières. Ils prouvent que le développement durable n’est pas un luxe occidental, mais une urgence universelle.
Obstacles, mais pas d’obstacles
Bien sûr, le chemin n’est pas sans embûches. Ces jeunes entrepreneurs font face à des difficultés de financement, à un manque de reconnaissance, à l’absence de politiques publiques cohérentes. Mais ils avancent. À coups de bouts de ficelles, de vidéos TikTok, de partenariats informels et de détermination brute.
Et ce qui les pousse, au fond, ce n’est pas juste l’envie de réussir, c’est le désir profond d’être utiles. De contribuer à la préservation de leur territoire. De bâtir une Afrique qui ne reproduit pas les erreurs des pays industrialisés, mais qui invente son propre modèle de prospérité, ancré dans la nature et la solidarité.
Une nouvelle Afrique se construit dans les ruelles
En racontant ces histoires, on comprend que nous ne sommes pas en marge de la transition écologique : nous sommes à l’avant-garde. Et cette avant-garde a le visage de jeunes qui n’attendent pas que le changement vienne d’en haut. Ils le créent, avec ce qu’ils ont sous la main. Parfois un vieux pneu. Parfois un tas de compost. Parfois une simple idée qui germe dans une cour de quartier.
Alors, la prochaine fois que vous croiserez un sac plastique abandonné ou une boîte de conserve rouillée, pensez à ces jeunes. Ils pourraient bien en faire le socle d’un avenir plus vert.