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Le refus historique qui a bouleversé Paris et inspiré toute l’Afrique

En 1958, la Guinée a refusé la Communauté française proposée par De Gaulle et a choisi une indépendance totale. Sabotages, faux billets, coups d’État… Découvrez l’histoire d’un peuple qui a fait de son “Non” un symbole de dignité africaine.

referendum 1958 Guinée
referendum 1958 Guinée

Le 28 septembre 1958, un petit pays d’Afrique de l’Ouest entre dans l’histoire.
Ce jour-là, la Guinée dit NON à la Communauté française proposée par le général De Gaulle.
Un mot simple, mais qui va résonner comme un coup de tonnerre à Paris, à Conakry, et dans toute l’Afrique.

Ce “Non” n’était pas un simple refus. C’était un cri.
Un cri de dignité, un cri de liberté, un cri qui disait : “Nous préférons être pauvres mais libres, plutôt que riches dans l’esclavage.”

Ce choix courageux allait coûter cher. Très cher.
Sabotages économiques, complots politiques, tentatives d’assassinat, isolement international… la Guinée allait tout subir.
Mais au lieu de s’effondrer, ce petit pays allait devenir le symbole de la résistance africaine.

 1. Le contexte : une Afrique sous tutelle

En 1958, l’Afrique francophone vit encore sous le joug colonial.
Officiellement, la France parle de “modernisation” et de “coopération”.
En réalité, elle veut maintenir sa mainmise sur ses anciennes colonies, sous une nouvelle formule : la Communauté française.

De Gaulle propose un marché :

  • Dire “OUI” → rester sous l’aile de Paris, avec une pseudo-indépendance.

  • Dire “NON” → quitter immédiatement la France, sans filet, sans aide, sans transition.

Un chantage à peine voilé.
La plupart des dirigeants africains, prudents, préfèrent dire “Oui”.
Mais en Guinée, une voix s’élève. Celle d’Ahmed Sékou Touré.

 2. Le courage d’un peuple

Sékou Touré n’est pas seul. Derrière lui, un peuple.
Un peuple fatigué de l’humiliation, fatigué de la dépendance, fatigué de l’idée que son avenir doit toujours être validé par Paris.

Le 28 septembre, la Guinée vote massivement NON.
Seule contre tous.
Seule face à l’ancienne puissance coloniale.

Ce geste stupéfie le monde.
Pour la première fois, une colonie française refuse d’entrer dans la Communauté française.
La Guinée devient le premier pays francophone d’Afrique à proclamer son indépendance.

 3. La colère de la France

À Paris, l’humiliation est totale.
La Guinée vient de briser le mythe de la “Communauté” et de l’autorité de De Gaulle.
La réponse est brutale.

Dans les semaines qui suivent :

  • Les fonctionnaires français quittent le pays en masse.

  • Les archives administratives sont brûlées.

  • Les machines et équipements publics sont démontés ou détruits.

  • Même les ampoules des bâtiments sont arrachées.

Mais cela ne suffit pas.
La France veut asphyxier économiquement la Guinée.

 Elle imprime des milliards de faux billets guinéens pour inonder le marché, provoquer une inflation incontrôlable et détruire la jeune économie.
  Elle soutient des centaines de complots et de tentatives de coups d’État, financés depuis les pays voisins.
  Elle orchestre même des tentatives d’assassinat contre Sékou Touré.

Tout était permis pour briser ce pays qui avait osé défier l’empire.

 4. La résilience guinéenne

Mais au lieu de plier, la Guinée résiste.
Privée de soutien occidental, elle se tourne vers de nouveaux alliés :

  • Le Ghana de Kwame Nkrumah.

  • L’URSS.

  • La Chine maoïste.

Elle expérimente, parfois maladroitement, mais elle avance.
Dans les villages, dans les villes, les Guinéens apprennent à produire, à bâtir, à vivre sans maître.

C’est ce courage collectif, plus encore que les discours, qui marque l’histoire.
La Guinée n’est pas tombée.
La Guinée a tenu bon.

 5. Le caillou dans la chaussure de Paris

Pour la France, la Guinée devient un problème permanent.
Parce que son “Non” inspire.
Parce que son indépendance rapide prouve qu’il est possible de se libérer sans passer par la tutelle coloniale.

À partir de 1960, la vague des indépendances déferle sur l’Afrique.
Et dans chaque discours, dans chaque rêve de liberté, plane l’ombre du geste guinéen.
La Guinée est devenue le caillou dans la chaussure de Paris.
Un petit pays… mais un immense symbole.

 6. Sékou Touré : entre courage et complexité

Il serait impossible de parler de 1958 sans citer Ahmed Sékou Touré.
Son courage, sa voix, son refus catégorique ont porté ce “Non” historique.
Mais il ne faut pas oublier : ce n’est pas seulement un homme qui a dit non.
C’est un peuple.
Un peuple qui a fait corps avec son leader.

Sékou Touré restera une figure complexe — à la fois héros de l’indépendance et dirigeant critiqué par la suite.
Mais en 1958, il incarne le courage et la dignité d’une nation.

 7. L’héritage aujourd’hui

Plus de 60 ans après, que reste-t-il du “Non” de 1958 ?
Beaucoup de blessures, certes.
Mais surtout une immense fierté.

La Guinée a montré au monde qu’un pays africain pouvait refuser le compromis, même face à une puissance coloniale.
Elle a inspiré des générations de militants, de dirigeants, de citoyens à croire que la liberté vaut tous les sacrifices.

Aujourd’hui encore, ce choix fait partie de l’ADN guinéen.
Un héritage de dignité et de souveraineté.

  Une question ouverte

L’histoire de la Guinée n’est pas seulement celle d’un refus.
C’est celle d’un peuple qui a montré que la liberté n’a pas de prix.

Mais une question demeure :
  Si la Guinée n’avait pas dit NON en 1958, les autres pays africains auraient-ils eu leur indépendance en 1960 ?
  Ou bien l’histoire aurait-elle pris un tout autre chemin ?
  Serions-nous encore, aujourd’hui, sous la tutelle française ?

À vous d’en débattre.

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